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une profonde impression sur les assistants, hommes, femmes, enfants, qui s’étaient successivement amassés autour de ce docteur de la Loi agenouillé et priant. Tout ce peuple fondit en larmes. Sous le coup de cette violente émotion, quelqu’un émit une proposition grave. Il y avait un moyen, lui semblait-il, de réparer le passé et de conjurer les effets de la faute commise : « Prenons l’engagement solennel de répudier les femmes étrangères et d’exclure de la communauté les enfants issus de la mésalliance ! » S’emparant aussitôt de cette parole, Ezra se lève et somme les chefs de famille de jurer devant Dieu, à la face du sanctuaire, que tous ceux qui avaient épousé des étrangères chasseraient femmes et enfants de leurs foyers. Ce fut un instant grave et décisif pour l’avenir de la nation.

Ceux qui, dans la surprise de la première heure, avaient prononcé ce serment, durent respecter leur parole et, la mort dans l’âme, se séparer de leurs femmes étrangères et de leurs propres enfants. Les fils et les parents du grand prêtre furent tenus de donner l’exemple. Une sorte de sénat, composé des Anciens les plus zélés pour l’exécution de la Loi, fit signifier, par des hérauts envoyés dans toutes les villes de Juda, que quiconque avait contracté une de ces unions mixtes exit à se présenter dans les trois jours à Jérusalem, sous peine d’être dépossédé de tous ses biens et exclu de la communauté. Une commission d’enquête, dont Ezra lui-même choisit les membres, fut nommée à cet effet : elle avait pour mission de rechercher les individus engagés dans ces liens illicites, et de les inviter à venir à Jérusalem pour déclarer qu’ils s’étaient définitivement séparés de leurs femmes. Les Anciens ou les juges de chaque ville devaient également se rendre à Jérusalem, pour certifier l’exécution du décret. En conséquence de cette rigoureuse injonction, tous les provinciaux qui s’étaient rendus à l’assignation durent expulser femmes et enfants, comme l’avaient déjà fait les Jérusalémites. Plusieurs toutefois paraissent avoir résisté par affection pour leur propre famille ou par considération pour leur famille d’alliance, avec laquelle ils avaient conservé d’étroites relations.

Cette impitoyable exclusion des peuples voisins, Samaritains, Ammonites et autres, produisit, comme on pouvait s’y attendre,