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possession de la Judée, l’une et l’autre avaient intérêt à gagner les Judéens à sa cause. Ceux-ci restèrent toujours fidèles partisans de la dynastie des Ptolémées et lui prêtèrent tout leur appui. Aussi Ptolémée Philométor, sixième du nom, accueillit-il volontiers les fugitifs de la Judée qui, sous le règne d’Antiochus Épiphane, quittèrent leur patrie, par bandes nombreuses, pour se soustraire à la domination despotique des Syriens. Parmi ces fugitifs se trouvait le fils du grand prêtre Onias III, avec d’autres personnages de familles illustres, qui furent traités par le prince égyptien avec des égards tout particuliers et qui trouvèrent dans la suite l’occasion de se distinguer. S’attacher les mécontents de la Judée afin de rentrer avec leur aide en possession de la Palestine, qui avait été enlevée à l’Égypte sous Antiochus le Grand, c’était pour le gouvernement de ce pays, un devoir commandé par une saine politique. Sans doute, en Égypte pas plus qu’en Syrie, on ne s’attendait à voir la lutte entamée par les patriotes judaïtes contre les armées syriennes prendre un tour si imprévu et procurer à la Judée une indépendance relative.

Les Judéens s’étaient principalement concentrés à Alexandrie, la première cité du monde après Rome pour le commerce et la politique, la première après Athènes pour les arts et les sciences. Parmi les cinq quartiers d’Alexandrie, désignés par les cinq premières lettres de l’alphabet grec, les Judéens en occupaient deux presque entiers : le quartier du Delta notamment, sis au bord de la mer, était habité exclusivement par eux. De cette situation, ils surent tirer tout le parti possible : entrant dans la voie qui leur était indiquée, ils s’adonnèrent à la navigation et au commerce d’exportation. Une partie du blé que Rome tirait de l’Égypte pour nourrir ses légions dut sans doute être chargée sur les navires des Judéens et amenée sur le marché par des commerçants de cette nation. Comme Joseph leur aïeul, ils fournissaient ainsi aux contrées dépourvues de blé les richesses du sol fertile de l’Égypte. Cette activité produisit chez eux le bien-être et amena des habitudes d’existence plus raffinées. Cependant le commerce et la navigation n’étaient pas exclusivement entre leurs mains et ne formaient pas, d’ailleurs, leur unique occupation. Grâce à leur zèle pour l’étude et à leur souple intelligence, ils