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de la poursuivre à outrance, de détruire toute trace d’Israël et tout vestige de Jérusalem, puis de peupler le pays de colonies étrangères. Les Judéens hellénistes n’étaient pas exceptés de ce plan d’extermination. Que lui importaient, après tout, ces quelques sujets qui se soumettaient en esclaves à ses vues ou ceux mêmes qui les secondaient ? N’étaient-ce pas toujours des Judéens ? Lorsqu’ils eurent connaissance de ces projets, dont on ne faisait d’ailleurs nul mystère, les Judéens furent saisis de terreur et de désespoir, ceux-là surtout qui vivaient hors de la Judée, mêlés à des populations étrangères. La faible troupe conduite par Maccabée, quelle que soit sa vaillance, pourra-t-elle soutenir le choc d’une armée nombreuse, flanquée encore d’une compagnie d’éléphants ? En toute province et en toute ville où parvenaient les ordres du roi, un deuil immense se répandait parmi les Judéens, jeûnes, larmes et gémissements ; les plus notables se couvraient du cilice et se couchaient dans la cendre. Mais ce projet inouï de faire disparaître un peuple entier, hommes, femmes et enfants, eut cependant un avantage, celui de susciter à la patrie de nouveaux défenseurs. Les Judéens les plus tièdes et les plus mondains, même les plus amoureux de nouveautés, s’ils avaient absolument rompu avec le judaïsme, se rallièrent aux Maccabées : il n’y avait plus d’autre alternative.

Pour le moment, la situation n’était pas réjouissante. D’heure en heure on attendait une nombreuse armée syrienne, dont la masse énorme allait écraser les combattants Judéens. Il importait donc d’exciter le peuple entier à lutter avec courage et persévérance. Un ouvrage d’un caractère particulier, le livre de Daniel[3], fut composé à cet effet et répandu parmi les Judéens qui savaient lire. Sans aucun doute, il avait pour auteur un Hassidéen, qui l’avait destiné à ceux qui pensaient comme lui. Ce livre apocalyptique, mi-parti de chaldéen et d’hébreu et savamment ordonné, a pour but de glorifier, par de saisissants modèles, la constance dans la foi religieuse, puis d’inculquer et de faire bien comprendre au peuple que cette atroce persécution, qu’il subissait pour l’amour de sa Loi, n’était qu’une épreuve passagère. De fait, les plus pieux et les plus fidèles ne pouvaient se défendre d’en douter, aucun prophète n’ayant assigné un terme à cette cruelle