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aux fils de Serouya, ni même leur en faire reproche : il avait trop besoin d’eux. Mais, en présence de ses intimes, il formula des plaintes amères contre les coupables : Sachez-le, un grand prince d’Israël est tombé aujourd’hui. Pour moi, je suis trop faible, n’étant pas encore reconnu de tous, et les fils de Serouya sont plus puissants que moi. Que Dieu rende aux méchants ce qu’ils ont mérité !

La nouvelle de l’assassinat d’Abner atterra Isboseth. Ne se doutant point des intelligences secrètes de son général avec David, il ne pouvait ressentir que la perte irréparable d’un héros, son fidèle ami, le principal soutien de son trône. — Peu de temps après, Isboseth fut trouvé assassiné dans son lit. Ce fut l’écroulement de la maison de Saül.

Isboseth mort, le royaume des dix tribus revenait, par le fait, à David. Il y comptait aussi, de longue date, des partisans qui se souvenaient de ses exploits contre les Philistins, et qui vénéraient en lui l’homme choisi de Dieu par l’entremise du prophète Samuel. D’autres lui étaient déjà acquis par les soins d’Abner. Ceux-là même qu’avait scandalisés l’alliance de David avec les ennemis d’Israël ne pouvaient s’empêcher de considérer qu’il n’y avait d’autre parti à prendre que de le reconnaître roi. Les Anciens des tribus se rendirent donc à Hébron, prirent l’engagement de rester ses fidèles partisans et lui offrirent des présents de foi et hommage. Des Benjamites même le reconnurent, mais plus d’un à contrecœur et arec un secret dépit. Ainsi s’accomplissait l’ambition de David : l’humble chef d’une tribu devenait, après tant d’obstacles et de tribulations, roi de tout Israël. La scission entre les maisons de Jacob et d’Israël était écartée pour le moment : tous les symptômes étaient favorables à David. Le corps des prêtres et celui des prophètes, loin de prendre à son égard, comme ils l’avaient fait pour Saül, une attitude hostile, lui étaient cordialement affectionnés. Un descendant d’Héli, Abiathar, faisait partie de son entourage, avait eu part aux épreuves endurées par David : quant aux prophètes, ils se reconnaissaient en lui : n’avait-il pas été oint par leur chef Samuel ? Le prophète Gad était également de la société de David, et un autre prophète de cette époque, Nathan, était en quelque sorte son directeur de conscience. Il trouvait