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étant eux-mêmes imbus des erreurs dominantes et n’ayant que de vagues notions de la doctrine du Sinaï. Ils ne pouvaient pas, ces douze ou treize héros de la judicature, écarter définitivement des frontières du pays ses malveillants voisins, ni créer à l’intérieur une organisation durable. Même les plus marquants d’entre eux, Barak et la prophétesse Débora avec leur inspiration, Gédéon et Jephté avec leur valeur martiale, n’étaient pas assez forts pour créer ou restaurer l’unité nationale. L’importance de leur rôle, tout de circonstance, s’effaçait dès qu’ils avaient repoussé les ennemis, conjuré le péril, procuré une certaine sécurité à leurs concitoyens. D’autorité, ils n’en avaient point, même sur les tribus qu’ils avaient sauvées par leur courage. Les exploits de Samson n’empêchèrent pas les Philistins de considérer les tribus de leur territoire comme leurs sujettes ou mieux comme leurs esclaves, et de les traiter en conséquence ; et pareillement les victoires de Jephté sur les Ammonites ne les affaiblirent pas au point de les taire renoncer à leurs revendications contre les deux tribus et demie de la rive orientale.

Mais ce fut cet excès même de faiblesse qui, une fois constaté, amena graduellement la guérison et le retour des forces. Certains chefs de tribus durent enfin se convaincre que ces avances faites aux peuples voisins et cet empressement à les imiter, loin de profiter aux Israélites, les avaient annulés de plus en plus. Le souvenir du Dieu de leurs pères doit s’être réveillé dans les cœurs et avoir secoué les consciences. Avec ce souvenir s’éveilla la pensée du sanctuaire, de la tente sacrée dédiée à ce même Dieu dans Silo, et le besoin de la visiter. Aussi, vers la fin de l’époque des juges, Silo devint-il, plus qu’auparavant, un lieu de réunion. Là se trouvaient des lévites, gardiens encore fidèles de la doctrine mosaÏque, et ceux-là peuvent avoir fait sentir au peuple, dans les assemblées provoquées par les crises publiques, que ces crises avaient pour cause la détection envers le Dieu d’Israël et le culte rendu à Baal.

Or, en ces temps calamiteux vivait à Silo un prêtre, digne descendant d’Aaron et de Phinéas, le premier Aaronide de cette période dont le nom ait passé à la postérité. On le nomme simplement Héli, et on nous le montre comme un vénérable et doux