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les hommes versés dans la connaissance des temps passés, les Livres d’histoire. Les biens les plus précieux avaient pu se perdre ; mais un bien était resté, qui échappait aux ravisseurs et qui avait accompagné les exilés sur la terre étrangère. Cette riche et brillante collection d’écrits exerça l’action la plus salutaire : elle instruisit les esprits, ennoblit les âmes et rajeunit les cœurs ; elle apparut comme un foyer d’où rayonnaient, pour ainsi dire, les miracles. Ne s’était-elle pas littéralement vérifiée, cette prédiction qu’on y lisait, que le pays d’Israël vomirait le peuple à cause de sa folie et de ses vices, comme autrefois les peuplades cananéennes ? Ne s’étaient-ils pas accomplis, et avec l’exactitude la plus effrayante, les châtiments dont les prophètes avaient menacé Israël ? Journellement Jérémie avait annoncé, dans les termes les moins équivoques, la chute de la nationalité, de l’État, de la capitale et du temple ; Ézéchiel avait de même tracé à l’avance le funèbre tableau de la guerre et de l’exil, et ces prophéties s’étaient réalisées ; et, en remontant ainsi le cours des âges, on noyait que déjà Isaïe, Osée, Amos et Moïse lui-même avaient montré dans la ruine et l’exil les suites fatales de l’infraction à la loi. Et, malgré tant de calamités, le peuple n’avait pas péri tout entier ; un reste en subsistait, reste faible, il est vrai, et sans patrie, mais enfin toujours debout et qui précisément avait trouvé grâce aux yeux de ses vainqueurs. Il était donc visible que, même dans le pays de leurs ennemis, Dieu ne rejetait pas les enfants d’Israël, ne les avait pas définitivement repoussés ; qu’enfin il ne voulait ni les anéantir ni rompre l’alliance qu’il avait faite avec leurs pères.

Un autre miracle encore s’accomplit sous les yeux des exilés. Une partie des descendants des dix tribus, dispersées depuis plus d’un siècle dans les provinces assyriennes et qui passaient pour disparues, s’était conservée avec son caractère propre et se rapprocha, cordiale, de frères et de compagnons de malheur dont une haine factice l’avait si longtemps séparée. De ce côté aussi l’on voyait donc se réaliser les prophéties, l’union d’Israël et de Juda se rétablissait, et cet événement fut pour tous ceux que l’aveuglement ne rendait pas insensibles une source de confiance dans le caractère impérissable de la descendance d’Abraham. Ceux qui