ses compagnons lui crièrent : Tu mens : ce n’est pas Jéhovah, c’est ton disciple Baruch qui t’a suggéré ces paroles. Et, sans plus délibérer, ils se mirent en route pour l’Égypte, entraînant bon gré mal gré toute la foule et, avec elle, Jérémie et Baruch. Qu’eussent fait d’ailleurs, seuls dans le pays désert, ce vieillard et son serviteur ? La troupe arriva ainsi à la ville égyptienne de Taphnaï (Tachpanches), où elle trouva bon accueil : le roi Hofra n’eut point l’ingratitude de refuser l’hospitalité à ceux que ses incitations avaient précipités dans de telles infortunes. Les fugitifs rencontrèrent là d’autres Judéens qui les avaient devancés dans la contrée.
Juda, pendant ce temps, se voyait ravir ses derniers fils. Irrité du meurtre de Ghédalia et de ses soldats, Nabuchodonosor avait chargé le chef de sa garde du corps d’aller le venger et, pour la troisième fois, Nébusaradan s’était rendu à Jérusalem. Il n’y trouva plus que les laboureurs, les vignerons et les jardiniers abandonnés par Jochanan et ses compagnons. Ce reste du reste comptait en tout sept cent quarante cinq personnes, y compris les femmes et les enfants ; Nébusaradan l’emmena en captivité à Babylone (vers 582). C’était le troisième exil depuis Jéchonias : cette fois, encore les innocents payaient pour les coupables. L’histoire n’a point noté quel fut le sort d’Ismaël et de ses complices ; mais le nom de Ghédalia demeura gravé dans la mémoire des survivants et l’anniversaire de sa mort devint un jour de deuil national, que les Judéens de la Babylonie observèrent chaque année. Nabuchodonosor, à partir de ce moment, n’eut plus qu’un souci, ne pas laisser un seul Judéen dans la Judée. La contrée se changea ainsi en une solitude, entièrement veuve non seulement d’hommes, mais encore d’animaux domestiques, et où les bêtes fauves régnèrent sans partage, état de choses lugubre qui arracha des plaintes à un des prophètes postérieurs : Les saintes villes, s’écriait cet homme de Dieu, ont perdu leurs habitants, Sion est devenu un désert, Jérusalem une solitude. Le sol de Juda put, dans toute la force du terme, se reposer et observer les années sabbatiques, depuis si longtemps enfreintes, sauf dans quelques régions du sud, dont les Iduméens s’emparèrent, avec ou sans la permission du roi de Babylone, et qui étendirent le territoire édomite jusqu’à