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des soupirs et il écoutait volontiers les prophètes. Mais il était sans force contre sa cour. S’il désira très sincèrement tenir la foi jurée à Nabuchodonosor ; l’énergie lui manqua pour le faire jusqu’au bout, nonobstant les intrigues. Des complots s’ourdirent en arrière de lui, que sa solitude ne lui permit pas de pénétrer à temps ou que, s’il les vit, il fut impuissant à déjouer. Cette faiblesse, d’une part, et cette témérité, de l’autre, perdirent l’État judéen. Une sorte de vertige saisit les princes. De divers cités on leur promettait merveilles pour les exciter à la révolte. L’Égypte d’abord, comme toujours fausse et fourbe, se montrait prodigue d’offres brillantes, qu’après elle ne tenait que rarement. C’était ensuite le roi de Tyr, Ithobal, fomentant une ligue contre Babylone. Enfin venaient les Judéens de Babylonie, qui, de leur exil, entretenaient d’actives relations avec la mère patrie et poussaient à une nouvelle guerre, dans le vague espoir d’une défaite de Nabuchodonosor, qui leur rouvrirait le chemin de leur patrie. Retour que de faux prophètes leur prédisaient comme prochain.

Sédécias régnait depuis quatre ans (593), lorsque arrivèrent simultanément à Jérusalem des ambassadeurs d’Édom, de Moab, d’Ammon, de Tyr et de Sidon, qui tous voulaient l’entraîner à rompre avec Nabuchodonosor et employèrent toute leur éloquence à l’y décider. En vérité, Juda eût pu s’enorgueillir de se voir si recherché et il ne tenait qu’à lui de se considérer comme le centre, en quelque sorte le moteur des événements politiques. On ne connaît pas la réponse du roi aux ambassadeurs : irrésolu comme il était, il dut se laisser ballotter de côté et d’autre, sans parvenir à prendre un parti.

Ces extravagantes manœuvres n’échappèrent point à la clairvoyance de Jérémie, qui eut le courage très grand de s’y opposer. Pour le prophète, il était visible que Nabuchodonosor était appelé à poursuivre le cours de ses victoires et à soumettre un grand nombre de nations. Il exhorta donc Sédécias, le peuple et les prêtres à ne pas s’abandonner à de douces illusions et à subir la domination babylonienne, s’ils ne voulaient être écrasés par le puissant monarque. Jérémie se crut aussi le devoir d’avertir les exilés et leur adressa une lettre ainsi conçue : Construisez