le temple, à tout le peuple assemblé de la capitale et de la province : il ne pouvait, ajouta-t-il, le faire lui-même, Baruch devait le remplacer. Ce message, sous le coup de la catastrophe imminente, — l’armée de Nabuchodonosor n’était plus qu’à une faible distance de Jérusalem, — fit une impression profonde. La foule en fut bouleversée. Un jeune homme, qui se trouvait également sur la place du temple, Michée, fils de Ghemaria, vola auprès des princes réunis dans une salle du palais et, sous le coup de son émoi, leur fit part de ce qu’il venait d’entendre. Non moins troublés, ils invitèrent Baruch à lire une seconde fois, eux présents, le texte qui confirmait la prophétie de son maître. Chaque mot les atteignit au cœur, l’angoisse les saisit. Ils résolurent d’avertir le roi, dans la pensée qu’il partagerait leur émotion et renoncerait à toute idée de résistance. De prime abord leur espoir parut se réaliser: Joachim envoya chercher le rouleau et s’en fit donner lecture. Mais, à mesure qu’un feuillet était lu, il le prenait et le jetait dans un brasier placé devant lui, au grand effroi des princes, qui le supplièrent de ne pas défier le sort, et il continua ainsi, nonobstant leurs prières, à livrer les pages l’une après l’autre aux flammes, jusqu’à ce que tout le rouleau fût consumé. Il fit plus : il donna l’ordre de rechercher la prophète de malheur avec son disciple et de leur ôter la vie, comme autrefois à Urie. Heureusement les princes avaient déjà pris soin de les faire cacher en lieu sûr : les deux hommes furent ainsi sauvés. II est probable qu’après une journée si agitée, la grande assemblée de jeûne se sépara indécise. La lecture du rouleau produisit néanmoins un effet : elle divisa les princes. Ceux qui croyaient dans Jérémie et l’avaient soustrait aux poursuites se montrèrent sans doute résolus partisans de la soumission. Parmi eux se trouvait le scribe Elischama, préposé aux affaires militaires. Du moment où celui-ci et beaucoup d’autres membres considérés du conseil se prononçaient contre la guerre, il était interdit à Joachim de l’entreprendre, alors surtout qu’il y allait de l’existence du trône. Le roi fit donc sa paix avec Nabuchodonosor, lui paya le tribut imposé au royaume, promit vraisemblablement aussi le concours de son armée, bref se soumit à toutes les obligations de la vassalité. Ce fut le commencement de la suzeraineté chaldéenne sur
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