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du palais dut agir sous l’inspiration d’Isaïe. Ézéchias lui-même, amené à reprendre part aux affaires publiques, parut obéir à ses conseils. La chute de Schebna fut un retour à un meilleur état de choses.

Mais il n’était plus possible de revenir sur ce qui s’était fait. Transporté de colère à la nouvelle de la défection d’Ézéchias, Sennachérib avait marché sur le royaume de Juda. Il prit d’assaut et détruisit toutes les places fortes, dont les habitants s’enfuirent en se lamentant vers Jérusalem. Les assyriens n’épargnaient ni l’âge, ni le sexe. Les routes étaient désertes, nul voyageur ne parcourait le pays, l’ennemi n’avait égard à aucun homme. Le courage des plus vaillants s’évanouit, à mesure que l’ennemi approchait de la capitale, et l’orgueil se changea en abattement. Résister, on n’y songeait pas. Mais, tandis que tous désespéraient, le prophète Isaïe conserva toute sa fermeté et sa parole releva les esprits. Il se rendit sur une des vastes places de Jérusalem et y prononça encore un de ces discours où l’enthousiasme le dispute à la beauté de la forme et comme seul il savait en faire couler de ses livres. Il montra Israël délivré de l’Assyrien et un brillant avenir s’ouvrant devant lui: Les exilés de tous les pays reviendront dans leur patrie, les exilés des dix tribus s’uniront à Juda, la jalousie et l’inimitié ne régneront plus entre eux ; les prodiges de la sortie d’Égypte se renouvelleront et le peuple entonnera de nouveau un cantique d’action de grâces :

Triomphe et fais retentir ton chant, habitant de Sion,
Car il est grand au milieu de toi, le Saint d’Israël.

Puissance admirable de l’esprit, force irrésistible de la confiance en Dieu, dans la victoire finale de la justice et la paix éternelle, qui, dans les affres de la terreur, de la dévastation et du désespoir, en face des mortelles tristesses du présent, tenait ferme l’image d’un avenir heureux ! Le pays était ravagé, les villes incendiées, le sol nourrissait les conquérants qui l’écrasaient, la chute prochaine de la capitale semblait inévitable, Jérusalem allait avoir le sort de Samarie, et, en présence d’une si navrante perspective, Isaïe maintenait avec constance la révélation qu’il avait