Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/219

Cette page n’a pas encore été corrigée

montrer sourds aux exhortations des prophètes. Isaïe, qui avait annoncé à la pécheresse Samarie que la couronne d’orgueil dominant sur la grasse vallée des ivrognes d’Éphraïm serait comme un fruit hâtif, aussitôt consommé ; Isaïe, dont la prédiction s’était réalisée, trouvait maintenant des auditeurs plus dociles. A quoi avait-il tenu que Jérusalem ne partageât le sort de Samarie ? A un simple caprice du conquérant assyrien. La crainte ramena l’humilité dans les cœurs et rendit Jérusalem attentive à ceux qui lui montraient la bonne voie.

Au reste, il régnait alors un prince comme la maison de Juda n’en avait plus vu depuis David. Fils d’Achaz, Ézéchias (Chiskiyahou — 724-696) était tout l’opposé de son père. Son âme tendre et poétique n’avait de penchant que pour l’idéal, et cet idéal lui apparaissait dans sa propre religion, dans les commandements et la tradition des temps antiques. Autant son père avait mis de zèle à propager les us étrangers et à faire la guerre au caractère national, autant Ézéchias s’appliqua à restaurer les mœurs de l’ancienne Judée, à épurer les idées et les institutions religieuses. Il prit la Thora pour guide, régla sur elle sa propre vie et celle de son peuple. Si jamais roi fut pour ses sujets un modèle et une lumière, ce fut Ézéchias. En lui brillaient non seulement la justice, la générosité, la grandeur d’âme, mais encore les vertus que d’ordinaire la couronne intimide et fait fuir : la mansuétude, la modestie et l’humilité. Il possédait cette piété profonde et cette pure crainte de Dieu qui sont aussi rares que la perfection artistique et le génie du capitaine. Les prophètes et les poètes sacrés avaient de bonne heure reconnu la noblesse de sentiment et les qualités du jeune prince. Pendant le règne funeste d’Achaz, qui fut une oscillation continue entre la faiblesse et la folie, ces hommes de Dieu, avec la communauté des humbles, avaient mis leur espoir dans le jeune fils du roi et attendu de son avènement le retour des temps glorieux de David. Ézéchias, qui avait vu avec douleur les égarements de son père, montra, aussitôt après sa mort, la répulsion qu’elles lui inspiraient. Il ne fit pas inhumer Achaz dans la sépulture héréditaire des rois de la race de David, mais dans un caveau tout exprès construit pour cet objet. Dans les débuts de son règne, les courtisans, les dignitaires