Page:Graetz - Histoire des Juifs, A. Lévy, tome 1.djvu/214

Cette page n’a pas encore été corrigée

Dans cette servile copie de l’étranger, Achaz franchit toutes les bornes : menacé un jour d’un grand malheur, il en vint à la pensée de sacrifier son propre fils en l’honneur d’un dieu imaginaire, à Moloch, barbarie effroyable qui se retrouvait dans le culte de l’idole assyrienne. C’est dans la belle vallée de Ghè-Hinnom ou Ben-Hinnom, à l’endroit où s’élargit, au sud-ouest, la vallée du Cédron, où la fécondité du sol, entretenue par la source de Siloé et par de frais ruisseaux, nourrit une végétation splendide, que s’éleva le bûcher (Tôphet) sur lequel, sourd aux cris déchirants de l’innocente victime, Achaz fit brûler un de ses fils. C’est là l’origine de la Géhenne. Il va sans dire que ces égarements ne restèrent pas sans influence sur les princes de Juda. Portés par leurs prédilections naturelles vers les us étrangers, qui laissaient toute carrière à leurs penchants, ils accueillirent avec plaisir cette assimilation à la puissance assyrienne. Plus que jamais, grâce à la faiblesse d’Achaz, ils pouvaient donner cours à leurs passions sensuelles et poursuivre leurs injustices envers le peuple. La contagion du mal avait également atteint les prêtres. Soit égoïsme, soit crainte, ils gardèrent le silence devant les actes du roi et des grands, ou s’ils parlèrent, ce ne fut qu’au gré de leurs désirs. Ils reçurent de l’argent et enseignèrent selon le cœur des puissants du jour. C’est d’un de ces prêtres dégénérés que vint sans doute cette interprétation, que l’immolation des premiers-nés, loin de déplaire à Dieu, lui était agréable, puisque la loi révélée à Moïse ordonne de consacrer à Dieu les premiers-nés, en d’autres termes, de les sacrifier par la flamme. Heureusement il existait encore des dépositaires de la doctrine primitive et d’une morale plus pure, qui élevèrent la voix et protestèrent, avec toute la force de l’éloquence et de la conviction, contre ces désordres et cette usurpation des mœurs étrangères. Un jeune prophète du temps mit hardiment le doigt sur la plaie et ne craignit pas, non seulement d’appeler le crime par son nom, mais encore de montrer, lui aussi, le germe d’où il sortait. Michée, de Morescha, probablement de l’école d’Isaïe, se partageait entre la lourde tâche de chercher à toucher le cœur des pécheurs et celle de leur montrer les suites de leur aveuglement. Un de ses discours,