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au peuple de saisir les prêtres et de les tuer, et de jeter leurs corps dans les flots du tison. Achab, abasourdi, laissa faire.

Mais Jézabel fut moins prompte à se résigner. Dès qu’elle sut ce qui s’était passé, elle menaça le prophète de lui faire subir le même sort, et celui-ci, obligé de songer à sa sûreté, s’enfuit dans le désert, jusqu’au mont Horeb. Là, dans ce lieu où avait été révélée la simple et pure loi de Dieu, la règle de l’ordre moral, il allait apprendre que son ardeur l’avait emporté trop loin. Retiré dans une grotte du Sinaï, au fond d’un désert sauvage, où sa voix seule faisait résonner l’écho, il se répandait en plaintes : J’ai eu du zèle, gémissait-il, pour la cause de Jéhovah, parce que les fils d’Israël ont abandonné son alliance, détruit ses autels et exterminé ses prophètes ; moi seul je suis resté et voilà qu’ils en veulent aussi à ma vie, lorsqu’un signe l’avertit que Dieu ne se manifeste ni dans la tempête, ni dans le tremblement de terre, ni dans la violence des flammes, mais dans un léger murmure. Il comprit qu’il devait rebrousser chemin, choisir son successeur et se retirer de la scène, parce que, poussé jusqu’à l’effusion du sang, son zèle n’avait point été agréable au Seigneur.

Pendant son absence, qui fut assez longue, une sorte de trêve semble avoir régné entre la maison royale et les partisans d’Élie. Achab, à qui l’événement du Carmel avait dû ôter de sa foi dans Baal, avait arrêté, autant qu’il tuait en lui, la persécution des prophètes ; ceux-ci, de leur côté, se montraient plus tempérés. Des cercles d’apôtres se formèrent à Ghilgal, à Jéricho, à Béthel même, sans être inquiétés. Un seul de ces disciples, Michée, fils de Yimla, persévéra dans son hostilité envers Achab et lui prédit malheur aussi souvent que celui-ci l’interrogea sur l’avenir d’une entreprise. Le roi cependant lui laissa la vie et se contenta de le faire jeter en prison.

Assez de présages, du reste, avertissaient le fils d’Omri de revenir à une politique plus israélite. Le roi d’Aram Ben-Hadad II, dont les conquêtes augmentaient chaque jour la puissance et les prétentions, lui déclara la guerre, et, profitant de l’état de faiblesse où les troubles intérieurs, avec la disette, avaient plongé le royaume, soumit des provinces entières du pays d’Éphraïm. Bientôt il mit le siège devant Samarie (vers 904). Dans cette