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comme celle qui précède d’ordinaire une nouvelle ère de l’histoire. Il fallait qu’on vit si l’antique croyance dans le Dieu d’Israël avait d’assez profondes racines. assez de vitalité, pour vaincre le principe contraire et expulser l’élément étranger. L’action décisive, à de telles époques, vient généralement d’une personnalité vigoureuse, en qui s’incarne la bonne cause et qui en est dominée tout entière ; c’est elle alors qui, par sa fermeté, son ardeur et son esprit de sacrifice, entraîne les indécis, fortifie les faibles, aiguillonne les indolents et sauve ainsi l’originalité du génie national. Et, s’il arrive que ce soit précisément la lutte avec le principe ennemi qui suscite cette volonté, elle agit avec une force supérieure et crée, en quelque sorte, un monde nouveau. C’est un caractère de cette nature qui apparut en la personne du prophète Élie (920-900).

D’où sortait-il, cet homme énergique, à l’impulsion puissante Quelle tribu avait eu son berceau ? Qui fut son père ? Autant de détails qu’on ignore. Il est simplement connu sous le nom d’Élie (Éliahou) le Thisbite. C’est à Galaad, sur la rive gauche du Jourdain, qu’il se montra pour la première fois ; il n’y avait pas droit de cité, mais appartenait à cette classe de personnes appelées Taschabim et qui ne possédaient que des droits partiels. Nature impétueuse, étrangère à tout respect humain, et toujours prête à risquer sa vie pour sa conviction, il fut pour les générations suivantes la personnification du zèle religieux et moral. Il arrivait comme une tempête, grondait comme une tempête autour du faible Achab, gouverné par sa femme, lui jetait une parole foudroyante, puis, comme la tempête, s’éloignait en grondant, sans qu’on parvint jamais à le saisir, et en grondant disparaissait. Élie respirait une pensée unique, absolue, celle de faire revivre le souvenir du Dieu d’Israël, qui menaçait de s’effacer dans l’âme du peuple . c’est à cette pensée qu’il se voua tout entier.

Il se reconnaissait à ses dehors. Contrairement aux prophètes idolâtres, qui se singularisaient par leurs manières efféminées, il portait, sous un manteau noir, une simple tunique, serrée par une ceinture de cuir, et laissait croître sa chevelure[3]. A l’opposé des adorateurs de Baal, il s’abstenait de vin et inaugura la vie naziréenne, dont c’était précisément le signe extérieur de ne boire