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servage. Si tu veux alléger notre joug, nous te promettons obéissance. Déconcerté par ce langage net et hardi, Roboam répondit, en dissimulant son dépit, qu’on eût à reparaître dans trois jours pour chercher sa réponse. Quelle réponse comptait-il donner aux Anciens ? Il l’ignorait encore lui-même, et il voulut d’abord consulter ses serviteurs. Les vieillards opinèrent pour la douceur, les jeunes gens pour la rigueur, et le malavisé monarque adopta ce dernier parti. En recevant, le troisième jour, les Anciens et Jéroboam, il les gourmanda d’une parole hautaine et dont il attendait un effet foudroyant : Mon petit doigt est plus fort que n’étaient les reins de mon père ! S’il vous a châtiés avec des verges, moi je vous flagellerai avec des scorpions. C’est ce qu’attendait Jéroboam, et il comptait sur cette réponse. L’Éphraïmite, qui, dès le principe, n’avait pas d’autre pensée que la révolte, se tourna aussitôt vers les Anciens et s’écria : Qu’avons-nous de commun avec David ? Qu’avons-nous à démêler avec le fils de Jessé ? A vos tentes, Israélites ! Et toi, David, gouverne ta propre maison. Après quoi Jéroboam déploya le drapeau de la révolte et rassembla les Sichémites, qui se groupèrent avec empressement autour de lui pour marquer leur hostilité à l’égard de Roboam. Toute la jalousie, toute la haine qui, sous les règnes de David et de Salomon, couvait dans le cœur des Éphraïmites, irrités de leur subordination et de leur prétendu abaissement, fit brusquement explosion. Ils saisirent cette occasion de s’affranchir de sceptre de la famille de David et de redevenir, comme autrefois a l’époque des juges, la tribu dominante. Les Sichémites, toujours guidés par Jéroboam, assaillirent à main armée la maison où se tenait Roboam. Celui-ci envoya son commissaire Adoniram pour mettre les séditieux à la raison, comme un troupeau d’esclaves mutinés. Mais Adoniram fut accueilli par une grêle de pierres, et il tomba mort sur la place. Le roi, voyant sa propre vie menacée, s’éloigna en toute hâte de Sichem sur son char, et gagna Jérusalem. La rupture était consommée, elle était irréparable.

Quelque outré qu’il fût de cet échec, Roboam avait besoin, avant d’agir, de savoir s’il pouvait compter sur des partisans fidèles. Que faire si les tribus voisines de sa capitale, entraînées par l’exemple des Sichémites, allaient à leur tour lui refuser l’obéissance ?