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de côtes et de marchés ; les marchands israélites, qui entretenaient des relations avec les pays étrangers, furent, sans le savoir, les premiers messagers qui révélèrent le Dieu d’Israël aux peuplades païennes. Un jour, Jérusalem reçut une surprenante visite. La sage reine du pays de Saba, pays fertile en aromates, situé sur la côte arabique de la mer Rouge, et visité par les navigateurs israélites, vint à Jérusalem avec une suite nombreuse : elle avait entendu dire merveille de la gloire de Salomon et de la puissance du Dieu d’Israël, et elle voulait s’assurer par elle-même de la vérité de ces récits. Accueillie avec déférence par Salomon, la reine de Saba — que la légende nomme Belkis — eut avec lui de nombreux entretiens ; elle admira sa sagesse, le temple qu’il avait élevé à Dieu, l’éclat et la belle ordonnance de sa cour. Elle mit, dit-on, sa sagesse à l’épreuve, en lui proposant des énigmes, qu’il résolut de façon à l’émerveiller.

Toutefois, cette royauté même de Salomon, si glorieuse au dedans et au dehors, renfermait le germe destructeur de l’édifice politique si merveilleusement construit. Malgré ce temple, qui donnait un centre au pays ; malgré les efforts de Salomon pour remplacer les groupes isolés des tribus par une rigoureuse unité, il n’était pas encore parvenu à réaliser la fusion intime de ces tribus en un corps national. Seule, la tribu de Benjamin restait étroitement attachée à celle de Juda, parce que Jérusalem et le temple se trouvaient sur son propre canton, et que des familles notables benjamites s’étaient fixées dans la nouvelle capitale ; Salomon lui-même, d’ailleurs, peut avoir donné aux Benjamites, sa tribu natale, une préférence sur les autres tribus. Mais, d’un autre côté, la mutuelle antipathie de la maison d’Israël et de la maison de Juda, c’est-à-dire des tribus du nord et de celles du midi, n’avait pas discontinué. Les tribus du nord nourrissaient un profond mécontentement à l’égard de Salomon, en dépit du bien-être dont elles lui étaient redevables, elles aussi ; elles ne sentaient que la pesanteur du joug que leur imposaient les prestations continuelles exigées pour l’approvisionnement de la cour et pour la construction des édifices. Le mécontentement, il est vrai, était contenu et silencieux, mais il n’attendait qu’une occasion pour éclater en révolte. Quelque sage que fût Salomon, sa