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l’oracle divin répondit : C’est à cause de Saül, de la persécution sanglante qu’il a exercée sur les Gabaonites. Là-dessus, David manda auprès de lui les Gabaonites survivants et leur demanda quelle réparation ils exigeaient. Mais ce n’était pas de l’argent qu’il leur fallait, c’étaient des victimes expiatoires, et ils réclamèrent l’exécution de sept descendants de Saül. Or, en les épargnant, David aurait irrité le peuple, qui l’aurait accusé de prolonger le malheur du pays par ce déni de satisfaction ; mais, d’autre part, il s’exposait au soupçon de vouloir, par esprit de vengeance ou par d’autres motifs intéressés, exterminer la postérité de Saül. Il lui fallut donc, la mort dans l’âme, obéir au vœu cruel des Gabaonites. Les deux fils que Saül avait eus de sa concubine Rispa et les petits-fils que lui avait donnés sa fille[10] Merab furent recherchés et livrés aux Gabaonites, qui les pendirent de leurs propres mains à Ghibeath-Saül, dans la ville même où leur père avait porté la couronne. David n’épargna que le fils de Jonathan, Mephisoseth, respectant ainsi le serment qu’il avait fait à son ami de protéger toujours ses descendants. Les cadavres des sept victimes devaient rester attachés au gibet jusqu’à ce que le ciel envoyât la pluie ; mais elle tarda longtemps à venir. Dans cette circonstance, la belle Rispa, pour laquelle Abner s’était brouillé avec Isboseth, montra de quoi une mère est capable. Pour préserver les corps de ses fils de servir de pâture aux aigles de l’air et aux chacals de la plaine, elle dressa sa couche sur le rocher où étaient exposés les cadavres, veilla sur eux d’un regard obstiné, bravant, le jour, les ardeurs de l’été, refusant, la nuit, le sommeil à ses yeux, pour écarter les animaux de proie de ces restes bien-aimés. Lorsque enfin, l’automne venu, la pluie tomba, on enleva les sept corps, et, sur l’ordre de David, on leur rendit les derniers honneurs. A cette occasion, il fit aussi chercher à Jabès-Galaad les ossements de Saül et de Jonathan, qu’on ensevelit à côté de ceux de leurs parents, dans le caveau de la famille de Kisch. Il paraîtrait que David fit redire alors son émouvante élégie sur la mort de Saül et de Jonathan, pour montrer combien lui tenait au cœur la chute de la maison royale de Benjamin, et il ordonna même que ce chant fût appris par cœur. — Quant à Mephiboseth, le fils survivant de Jonathan, qui avait vécu jusqu’alors dans la maison d’un homme notable