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forêts, il y a 133 845 hectares pour le domaine propre de l’État, 17 291 hectares indivis entre l’État et les communes, 197 554 hectares aux communes, 2 306 à des institutions privées, et 95 273 hectares aux particuliers. Ensemble les forêts placées sous la surveillance de l’État livrent annuellement 1 463 166 mètres cubes de bois, soit en moyenne 4,18 mètres cubes par hectare. Le revenu brut annuel des forêts domaniales s’élève à 60 francs, le revenu net à 33 fr. 50 par hectare. Au point de vue de la répartition des essences, nous avons en Alsace-Lorraine 34 pour 100 de sapins, 33 de hêtres, 19 de pins, 11 de chênes, le restant d’autres bois feuillus : le sapin prédomine dans les Hautes-Vosges, le hêtre dans les Basses-Vosges.

Comme le plus haut sommet des Vosges, le Grand-Ballon, ne dépasse pas 1 426 mètres d’altitude, les influences climatologiques permettent la culture du bois sur toute l’étendue de cette chaîne de montagnes, depuis le fond des vallées jusqu’aux dernières cimes. Autrefois toute la surface de nos montagnes était boisée, car on rencontre partout au milieu des pâturages, maintenant dénudés, des souches de sapins et de hêtres indiquant par leurs dimensions des arbres de la plus belle venue. Pourquoi ces arbres ont-ils disparu sur les hautes cimes ? les habitudes et les mœurs de nos campagnards l’expliquent suffisamment. Les bois des cimes gazonnées ont été détruits en vue des pâturages. Une fois détruits, le froid, les vents, la neige entravent leur relèvement ou leur reproduction. Tandis que les forestiers proclament les avantages du reboisement, la population pastorale des vallées s’efforce d’augmenter l’étendue des pâturages ou s’obstine à maintenir opiniâtrement à l’état de pâture les terrains dégarnis de bois. En outre, sur bien des points, les plantations nouvelles ont été détruites sans pitié, avec force protestations adressées aux préfets, chaque fois que le zèle des forestiers empiétait, sur les pâturages. Puis la dent du bétail avide rétrécit le domaine boisé dans tous les cantons où se relâche la surveillance.

Malgré cela, notre domaine forestier des Vosges reste encore beau dans son ensemble. Si nous considérons la végétation de nos montagnes, nous voyons immédiatement au-dessus des vignobles, et jusqu’au fond des vallées sur les versants moins chauds, le châtaignier et le chêne, tous deux exploités en taillis. Le châtaignier est une essence estimée, très utile sous tous les rapports.

Après la zone du châtaignier et du chêne vient celle du sapin, l’essence dominante dans les Hautes-Vosges et la richesse de nos montagnes. Exclu de la plaine comme arbre forestier, le sapin commun, Abies pectinata ou Pinus abies, dépasse souvent une taille de quarante mètres. C’est à ses sombres massifs que la Forêt-Noire doit son nom caractéristique. Difficile à élever sur les points où le climat et