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ROMAN D’UN PÈRE.

mère et moi, nous eûmes parfois besoin de recourir à notre autorité.

— J’aime bien le bon Dieu, disait cette révoltée, mais ce qu’on nous enseigne est aussi par trop absurde !

Le grand jour arriva ; cependant Suzanne n’avait accepté de son instruction religieuse que le côté du sentiment, mais là elle s’était donnée tout entière. Elle n’avait pas ce qu’on appelle la foi, mais elle avait l’amour. Je craignis que le catéchisme n’eût outre-passé les limites de ce qui est sain et raisonnable. Les trois jours de la retraite l’avaient laissée brisée et comme anéantie.

Le jour de la première communion lui donna une fièvre mystique dont je me serais assurément bien passé. Je n’entravai en rien cependant cet élan de ferveur, persuadé qu’en changeant de milieu, Suzanne redeviendrait ce qu’elle était, une petite femme très-raisonnable, quoi que très-enthousiaste. Mon attente ne fut pas trompée, si bien qu’un beau jour, conclusion peu logique de ses six mois de catéchisme, je m’aperçus que c’était elle qui commandait le dîner.

— C’est que je ne suis plus une enfant, main-