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ROMAN D’UN PÈRE.

j’étais le veuf qui reçoit des compliments de condoléance.

— C’est pour moi que vous êtes venue à Paris ? fis-je soudain. J’étais devenu extrêmement sceptique à l’endroit des dévouements.

Lisbeth tourna vers moi sa bonne figure de brebis maigre, rougit, toussa, revint à son mouchoir à carreaux, tortilla le coin de son châle jaune et finit par dire :

— Voyez-vous, cousin, on a dit dans le pays que vous étiez resté tout seul avec cette petite mignonne… alors j’ai pensé que vous seriez bien aise d’avoir quelqu’un pour mettre votre maison en ordre…

L’image menaçante de madame Gauthier se dressa devant moi, et je reculai mentalement devant sa vengeance.

— Ma maison est en ordre, cousine Lisbeth, dis-je tranquillement, et nous voulons rester seuls, Suzanne et moi. Avez-vous des amis à Paris ? je vous aurais engagée à aller les voir.

Lisbeth perdit tout à fait contenance.

— Mon Dieu, dit-elle, je ne connais personne, j’étais venue pour rester chez vous, pour vous rendre service… Vous n’allez pas me renvoyer comme ça !