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SUZANNE NORMIS.

— Si grand qu’il soit, fit madame Gauthier, j’aime assez ma petite-fille pour le faire à son intention.

— Mais moi, son père, repris-je avec fermeté, je ne puis l’accepter. Non, non, ma chère mère ; je serais un misérable égoïste. Vous m’avez parfois reproché d’être entêté, ma résistance ne doit pas vous surprendre. C’est mon dernier mot. Je pressais affectueusement les deux mains de ma belle-mère. — Permettez-moi, ajoutai-je, de vous remercier de cette bonne pensée ; je vous en serai toujours reconnaissant.

Je serrai encore une fois ses deux mains légèrement récalcitrantes, et je les reposai sur ses genoux de l’air d’un homme bien décidé. Ma belle-mère resta positivement pétrifiée.

Un second silence suivit ma péroraison ; mais cette fois je me sentais maître du terrain. Madame Gauthier se leva, toujours très-digne, rabattit son voile sur son visage et se dirigea vers la porte en disant :

— Votre fille sera la première victime de votre entêtement, mon gendre et vous serez la seconde.

— Oh ! chère mère, fis-je en souriant, car je devenais un profond diplomate, pour ne pas