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ROMAN D’UN PÈRE.

Très-troublé, je m’approchai d’elle. Je caressai ses cheveux, je baisai son front brûlant… elle avait la fièvre…

— Père, dit-elle tout bas, voilà six mois que je le cache, mais je meurs du mal du pays, il faut que je retourne en France ! Je n’ai pas voulu te le dire, je savais à quelles craintes j’allais t’exposer, mais je ne puis plus supporter ce désir qui me tue… Cette langue italienne me fait horreur. C’est mon pays que je veux, et si je dois mourir de chagrin ou de nostalgie, j’aime mieux mourir sur la terre de France !

Elle parlait vite maintenant, et ses larmes coulaient vite aussi ; ce pauvre cœur toujours déchiré, toujours saignant, toujours comprimé, s’épanchait enfin, avec la douceur douloureuse de la liberté longtemps désirée. Elle parla longtemps, et à la fin de chaque phrase revenait le nom de la patrie aimée, qui l’appelait si haut ! Je lui fis toutes les représentations possibles ; j’eus recours à tous les raisonnements, mais en vain. Elle acquiesçait à tout, approuvait tout, et répétait pour conclusion : Je veux revoir la France !

— Veux-tu, lui dis-je un jour, à bout de force, veux-tu que nous allions dans le Midi, quelque