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ROMAN D’UN PÈRE.

avec profusion, montait le long de la vieille cheminée luisante de suie : la cafetière de cuivre étincelait ; la crème épaisse tremblait dans le crémier de terre brune, et Lisbeth allait et venait avec une activité prodigieuse. Tout à coup un rayon de soleil pénétra par la porte que nous avions laissée ouverte et tomba sur les cheveux d’or de ma fille. Lisbeth fit le signe de la croix, et ses lèvres muettes s’agitèrent un peu :

— C’est une vieille habitude, dit-elle avec un sourire en se tournant vers nous ; chaque fois que je vois le soleil au lever du jour, il faut que je remercie le bon Dieu !

Et sa main vigilante ramena les tisons dispersés dans le foyer. Humble cœur, débordant de joie et de reconnaissance, elle trouvait moyen de remercier Dieu à toute heure du jour ! Quand Suzanne eut mangé quelques bouchées de pain, Lisbeth, qui s’était absentée un instant, revint tout essoufflée.

— La chambre de la petite est faite, dit-elle, j’ai mis des draps au lit ; elle va aller se coucher. Suzanne ne se fit pas prier. Elle monta sans faiblesse l’escalier de bois de chêne aux larges balustres noircis et polis par l’usage ; elle entra dans la chambre gaie et claire, où les poutres