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ROMAN D’UN PÈRE.

— C’est bien ce que je pensais, répondit-elle d’un air préoccupé.

— Mais tu sais, lui dis-je en l’attirant à moi, tu sais que tout est à toi, qu’il n’y a pas une obole à moi qui ne t’appartienne ?

Elle me serra fébrilement contre elle, m’embrassa et sortit sans parler. Ma belle-mère, qui la regardait tristement, n’essaya pas de lui rappeler sa présence. Depuis que nous étions si malheureux, sa jalousie puérile avait totalement disparu.

— Si j’étais vous, mon gendre, me dit-elle après que nous eûmes bien regardé les chenets sans rien dire, j’irais voir un peu cette maison-là. Il me semble que tout n’y va pas bien.

— Quand cela a-t-il été bien ? dis-je avec désespoir.

— J’ai dans l’idée que les choses vont plus mal qu’avant, insista madame Gauthier. Il y a dans l’attitude de Suzanne quelque chose d’extraordinaire… C’est votre fille, et vous êtes assez emporté sans qu’il y paraisse. J’ai peur qu’elle ne prenne quelque mauvaise résolution…

— Vous avez raison, dis-je. J’irai demain.

Le lendemain, en effet, vers midi, je me rendis chez mon gendre. Il était rarement chez lui