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SUZANNE NORMIS.

Je restai atterré, et, la tête dans mes deux mains, je maudis ma folie, mon imbécilité !

— Que faire ? dis-je machinalement. La séparation ?

— Certainement ! conclut mon légiste d’un ton joyeux.

Il voyait une bonne affaire, et moi, je voyais le nom de ma fille livré aux feuilles publiques. Je sentais la raillerie des regards méchants sur le visage innocent de ma Suzanne… Après tout, mieux valait encore l’esclandre, puisqu’il était nécessaire, que le martyre prolongé, la lente agonie de mon enfant dans les mains impures du misérable auquel elle était liée pour la vie.

J’annonçai mon intention de réfléchir et je rentrai chez moi.

Après une heure de méditation, je sortis et je me rendis chez mon gendre. Il était absent, ma fille aussi ; je laissai ma carte avec l’ordre de la remettre à M. de Lincy seul. Par quelques mots au crayon, je lui demandais un entretien particulier pour le soir même ou le lendemain matin. Puis je rentrai chez moi, afin de mûrir mon plan de campagne.