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ROMAN D’UN PÈRE.

XXV


Suzanne prit ainsi l’habitude de me visiter le soir. M. de Lincy, paraît-il, ne s’en occupait pas, car il n’en avait rien dit. Maurice venait parfois, mais rarement. J’appris par Pierre que plus d’une fois il avait sonné à ma porte, et, en apprenant que ma fille était avec moi, il s’était retiré sans vouloir se faire annoncer. Cette réserve me parut de bon goût, et je sus gré à ce jeune homme d’avoir su respecter ainsi les tête-à-tête que le destin clément me réservait avec Suzanne.

Un soir, après avoir babillé et ri pendant une demi-heure, celle-ci émergea des profondeurs du grand fauteuil où elle se roulait en boule, comme autrefois, s’assit posément sur le bord, et me regarda d’un air sérieux :

— Père, me dit-elle, je te demande pardon d’une question si saugrenue… mais j’ai besoin de savoir… Es-tu riche ?