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SUZANNE NORMIS.

irrésistible de rassurer Suzanne, je lui confiai ce que m’avait dit le docteur au sujet de ma santé.

— Alors tu n’es plus malade ? Ton pauvre cœur ne bat plus comme l’an dernier ? fit-elle avec une joie troublée.

— Non, je ne souffre plus du tout ; je passe de bonnes nuits…

Elle m’enlaça dans ses bras, et je sentis des gouttes chaudes tomber sur mes mains et sur mon visage.

— Cher, cher père, murmura-t-elle, que j’ai craint de te perdre ! Si tu savais que de fois, la nuit…

— Je le sais, lui dis-je ; je t’entendais, et je retenais ma respiration…

— Oh ! le méchant père, qui se faisait mal pour ne pas m’inquiéter… C’est fini, dis ?

— Le danger est passé, au moins : je vivrai, ma Suzanne, je te protégerai…

Elle me serra plus fort sans parler.

— Es-tu bien malheureuse ? lui dis-je tout bas.

Elle me regarda bien en face ; je lus une fois de plus dans ses yeux la douceur sublime, la joie ineffable du sacrifice, et elle me répondit :

— Je suis parfaitement heureuse !

Et elle se remit à pleurer.