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L’INTELLIGIBLE ET LE SENSIBLE

VI. Mais vous vous demandez peut-être quelle est la cause de cette faute volontaire ; c’est en effet la question où vous amène la suite logique du discours. Nous trouverons donc, ici encore, un principe conforme à la raison, qui éclairera notre recherche. Voici en effet l’enseignement traditionnel que nous avons reçu des Pères. Cet enseignement n’est pas un récit de forme mythique, mais tire sa valeur persuasive de notre nature elle-même.

[2] La pensée distingue deux mondes dans la réalité, que la spéculation divise en intelligible et sensible. Rien ne saurait être conçu à côté d’eux dans la nature, qui échappe à cette division. Un grand intervalle les sépare l’un de l’autre, de sorte que la nature sensible ne rentre pas dans les marques de l’intelligible, ni l’intelligible dans les marques de la nature sensible, mais que chacune d’elles tire son caractère propre de qualités contraires. La nature intelligible, en effet, est incorporelle, impalpable, sans forme ; la nature sensible, comme son nom l’indique, tombe sous la perception des sens. [3] Dans le monde sensible lui-même, malgré l’opposition profonde des éléments entre eux, un accord équilibrant les contraires a été ménagé par la sagesse directrice de l’univers, et ainsi se trouve réalisée l’harmonie intérieure de la création entière, sans aucune dissonance naturelle qui interrompe la continuité de l’accord. De même, il s’opère, par un effet de la sagesse divine, un mélange et une combinaison du sensible et de l’intelligible, pour que tout puisse participer également au bien, et que rien de ce qui existe ne soit exclu de la nature supérieure. Aussi, bien que la sphère convenable