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poient le rang que la nature leur assigne, et que la tyrannie leur refuse ?

Souvent en politique les révolutions brusques, à raison des désastres qu’elles entraînent, peuvent s’assimiler aux grandes convulsions de la nature. De la part des planteurs, c’est encore une nouvelle imposture d’avoir confondu la question de l’émancipation avec celle de la traite, d’avoir débité que les amis des Noirs vouloient un affranchissement subit et général. Ils opinoient pour une marche progressive qui opéreroit le bien sans secousse ; tel étoit l’avis de l’auteur de cet ouvrage, lorsque dans un écrit adressé aux Nègres et Mulâtres libres, et qui lui a valu tant d’injures, il annonçoit (et il l’annonce encore), qu’un jour sur les rivages des Antilles, le soleil n’éclairera plus que des hommes libres, et que les rayons de l’astre qui répand la lumière ne tomberont plus sur des fers et des esclaves[1] ; mais les planteurs français ont repoussé avec acharnement tous les décrets par lesquels

  1. V. Lettre aux citoyens de couleur et Nègres libres, in-8o, Paris 1791, p. 12.