dans toute la laideur du supplice qu’elle s’inflige à elle-même : « On voit, dit-il, des enfants qui sèchent et qui dépérissent d’une langueur secrète parce que d’autres sont plus aimés et plus caressés qu’eux ; c’est une cruauté trop ordinaire aux mères que de leur faire souffrir ce tourment. » Et en même temps, comme s’il perdait de vue ce que ce tourment a tout à la fois de dur et de honteux, il recommande de l’employer contre l’indolence à titre de remède. Ce n’est même pas pour lui, semblerait-il, un traitement d’exception ; il en conseille l’usage dans les cas ordinaires et pour donner à l’enfant, de temps à autre, la satisfaction de petites victoires sur ceux dont la rivalité lui est pénible. Singulière contradiction avec ce que sa morale pédagogique a généralement de si élevé et de si sain ! Heureusement ici encore il se sauve par un prompt retour à la vérité psychologique. Sa pensée est qu’il est bon d’élever les enfants par les enfants, c’est-à-dire de placer sous leurs yeux des exemples qui les éclairent, les animent et ne les découragent point : méthode excellente dont une observation excessive, jetée au courant de la plume, ne saurait infirmer la sagesse.
Nos réserves faites sur ces sortes de surprises, c’est merveille de voir quel sens exact et profond Fénelon porte dans la direction de cette première éducation dont dépend si souvent tout le reste. Il a observé l’enfant dans ses divertissements, cherchant de préférence le jeu où le corps est en mouvement, et s’amusant, pourvu qu’il change de place, d’un volant ou d’une boule ; il l’a vu au travail, l’esprit vacillant comme la lumière d’une bougie allumée dans un lieu exposé au vent, faisant une question, et, avant que la réponse soit