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dans un monde factice ! On ne peut empêcher l’enfant d’observer ce qui se présente à son regard et de reproduire ce qu’il voit ; il a le coup d’œil prompt, l’imitation facile ; et, « comme il n’est pas possible non plus de ne laisser approcher de lui que des gens irréprochables, le devoir est de lui faire distinguer sur ces gens mêmes ce qui est bien de ce qui ne l’est pas, » dût-on lui ouvrir les yeux sur les faiblesses de ceux envers lesquels il est d’ailleurs tenu de respect. Même quand il s’agit de piété, Fénelon fait nettement ses réserves. « La piété, dira-t-il, ne donne point tels ou tels défauts : quand elle est ce qu’elle doit être, elle les ôte, ou du moins elle les adoucit. Cependant, après tout, il ne faut pas s’opiniâtrer à faire goûter aux enfants certaines personnes pieuses dont l’extérieur est dégoûtant. » Cette fermeté dans le conseil n’est pas sans lui coûter. Aussi se hâte-t-il d’ajouter que, rien n’étant parfait sur la terre, on doit finalement admirer ce qui présente le moins d’imperfection, et ne se résoudre à certaines critiques que pour l’extrémité ; mais, en somme, il tient pour la sincérité : l’éducation est à ce prix.

C’est de ce sentiment de loyale et aimable clairvoyance que procèdent tous les moyens sur lesquels il établit son action pour fonder le caractère. Certes il ne refuse point au maître l’autorité dont il a besoin : comment pourrait-il oublier que le Sage recommande aux parents de tenir toujours la verge levée ? Mais il ne voudrait la laisser retomber que sur les enfants dont le naturel dur et indocile se dérobe à toute autre correction. Il n’aime pas les prescriptions sèches, les airs austères et impérieux ; il n’y voit qu’affectation, pédanterie,