Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/65

Cette page n’a pas encore été corrigée

feinte, point de finesse, point d’entourage « de petits esprits, de gens indiscrets et sans règle qui fassent métier de flatterie » ; point de complaisance pour soi-même : l’enfant, qui ne s’y trompe pas, ne devient ou ne reste sincère qu’envers ceux qui sont sincères avec lui ; s’il voit qu’on se pardonne trop aisément les fautes que l’on commet, il se réfugie dans une sorte d’indulgence pour ses propres passions ; il se garde et ne se laisse plus pénétrer. Parmi les attraits propres à le gagner à la simplicité et à la confiance, il n’en est pas de meilleur ni de plus nécessaire que la gaieté. Quel peut être sur une jeune fille l’effet « de la compagnie d’une mère qui l’observe et la gronde sans cesse, qui croit la bien élever en ne lui pardonnant rien, qui se compose avec elle, qui lui fait essuyer ses humeurs, qui lui paraît toujours chargée de tous les soucis domestiques, la gêne et la rebute ; qui, préoccupée de son directeur, la tourmente jusqu’à ce qu’elle le lui ait fait adopter, et qui l’oblige à faire un personnage forcé pendant plusieurs années » ? Cette sorte de contrainte est le plus sûr moyen de repousser les enfants en eux-mêmes. Ils n’auraient pas tant d’envie au moins d’aller chercher des sociétés moins bonnes si celle du foyer maternel leur était plus agréable. Il faut qu’ils soient libres de sentir comme ils sentent, et de témoigner leur ennui quand ils s’ennuient. Pour leur créer ou leur conserver cette franchise de caractère, Fénelon ne craint pas de les éclairer même sur le mal dont le monde offre l’exemple. Il aimerait à n’avoir à leur montrer que des gens de bien, de vertu commode et agréable, à ne rien laisser auprès d’eux de bas, d’intéressé, de faux : mais à Dieu ne plaise qu’il songe à les enfermer