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on précipite, ou force la marche, au risque de briser ou de fausser tous les ressorts de l’intelligence et du caractère. Fénelon croit utile, nous l’avons vu, de commencer l’éducation dès le berceau ; mais, si les premières impressions naturelles lui paraissent bonnes à mettre à profit, c’est à la condition de suivre l’enfant, non de le devancer, de régler doucement ses facultés naissantes, non de leur faire une sorte de violence en les obligeant ou même en les invitant par des procédés de culture artificielle à s’épanouir avant le temps. Il estime qu’à prévenir la nature on ne gagne rien, bien plus, qu’on court le danger de tout compromettre. L’objet de l’éducation du premier âge ne peut être que de donner au caractère sa direction, de frayer à l’intelligence ses voies.

C’est surtout du caractère que Fénelon s’occupe d’abord, bien qu’à vrai dire, à ce moment, il ne distingue guère le caractère de l’intelligence ; ses observations embrassent dans son ensemble le développement de l’enfant. Or, pour diriger l’enfant, le premier besoin est de le connaître, et pour le connaître il faut, par une conduite droite, aimable, familière sans bassesse, le mettre en pleine liberté de découvrir ses inclinations. De tous les défauts, l’hypocrisie est le plus grave, parce que, indépendamment du mal qu’il fait par lui-même, il sert de masque aux autres : rien de plus dangereux que « les caractères politiques, » dont la docilité calculée et la douceur apparente cachent une volonté âpre qui ne se marque qu’alors qu’il n’est plus temps de la corriger. Quelque effort d’observation et de patience qu’il en coûte pour voir clair dans l’esprit de l’enfant, tout doit être sacrifié à cet objet. Point de