faut avoir une grande foi dans leurs effets. « C’est un excès de confiance dans les parents, disait La Bruyère, d’espérer tout de la bonne éducation de leurs enfants, et une grande erreur de n’en rien attendre. » Fénelon est de ceux qui en attendent beaucoup. Il convient qu’il y a des natures ingrates sur qui la culture fait peu, et que la meilleure culture risque de ne rien faire lorsqu’elle n’est point prise à temps : les éducations traversées peuvent être difficiles ; « les éducations négligées ou mal réglées dans leur commencement forment comme une espèce de second péché originel dont on ne se rachète plus. » Mais à qui faut-il en imputer la faute, si ce n’est à ceux qui sont chargés de les conduire ? Dans un plan bien concerté, il n’est rien qui ne serve : les plus petites choses ont des suites insensibles qui, le branle une fois donné, agissent et portent ; les premiers préjugés — c’est-à-dire les habitudes profondément inculquées dès l’enfance — sont tout-puissants ; le pli en est ineffaçable et se conserve sous les transformations de l’âge. Fénelon revient à plusieurs reprises sur cette thèse ; il en marque, il en presse les conséquences hardiment. À voir avec quelle confiance raisonnée il subordonne la nature à l’éducation, on comprend que l’amendement du duc de Bourgogne ne lui ait pas paru une entreprise au-dessus de ses forces et quel esprit il y appliqua.
Tels sont, dans leurs caractères généraux, les principes sur lesquels repose l’Éducation des filles : action de la mère, appropriation de la direction aux conditions de la vie, application du possible dans l’idéal, respect de la nature, confiance dans l’efficacité de l’