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s’achemine ainsi tout naturellement à l’organisation d’une école normale telle que Saint-Cyr devait bientôt en ébaucher la première idée. Mais ce moyen de préparation si finement entendue ne l’engage dans aucune illusion. Pour appliquer ses conseils, il se contentera d’intelligences ordinaires, ne pouvant mieux espérer. Il n’exige pas au surplus qu’on vise « au plus fin » ; il lui suffit « qu’on conçoive le gros. » Nous reproduisons à dessein ses expressions dans leur simplicité. « Je sais, écrit-il encore, qu’on ne fait pas en général ce que je demande, et cependant ce que je demande n’a rien d’accablant et d’impraticable. De quoi s’agit-il au fond ? d’être assidu auprès des enfants, de les observer, de les mettre en confiance, de répondre nettement et de bon sens à leurs petites questions, de laisser agir leur naturel, et de les redresser avec patience lorsqu’ils se trompent ou font quelque faute. » Parmi les auteurs de systèmes d’éducation, il en est bien peu qui à la conception d’un idéal généreux aient joint une appréciation aussi mesurée des moyens d’en approcher. Fénelon a la notion exacte du possible dans le parfait, du possible pour le présent et du possible pour l’avenir. Il ne s’épargne à lui-même aucune objection, il compose avec les difficultés. « Le monde, disait-il, n’est pas un fantôme » ; nous dirions maintenant une abstraction. Avec lui, en effet, on se sent bien en pleine réalité, dans le courant inégal et ondoyant de la vie.

Mais, s’il admet les tempéraments que l’humanité comporte, il est un principe sur lequel tout relâchement lui paraîtrait absolument funeste. L’éducation est, à ses yeux, une œuvre de prévoyance, de suite et de