Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/58

Cette page n’a pas encore été corrigée

c’est cet avenir modeste qu’il a manifestement en vue toutes les fois qu’il pense à approprier plus particulièrement ses prescriptions aux besoins pour lesquels il a été consulté. Il applique le même principe à tous les genres de vie. « Si une fille doit vivre à la campagne, de bonne heure tournez son esprit aux occupations qu’elle y doit avoir, et montrez-lui les avantages d’une existence simple et agissante ; si elle est d’un médiocre état de la ville, ne lui faites point voir des gens de la cour : ce commerce ne lui servirait qu’à lui faire prendre un air ridicule et disproportionné. » Se renfermer dans les bornes de sa condition, telle est sa maxime. Il en pousserait presque la sagesse jusqu’à l’exagération, tant il est convaincu qu’une éducation qui ne s’ajuste pas à la fortune est pleine, pour les jeunes filles, de mécomptes et de périls ! Leur intérêt, comme l’intérêt commun, est de « leur former l’esprit pour les choses qu’elles auront à faire toute la vie. »

Ce sens du réel est un des traits les plus caractéristiques de la pédagogie générale de Fénelon. Il est le premier à convenir que dans son traité il a sacrifié un peu à l’idéal : « Quand on entreprend un ouvrage sur la meilleure éducation qu’on peut donner aux enfants, ce n’est pas pour donner des règles imparfaites. » J.-J. Rousseau dira de même, soixante ans plus tard dans la préface de l’Émile : « J’aimerais mieux suivre en tout la pratique établie que d’en prendre une bonne à demi. » Mais Fénelon ne propose « ce qui lui semble parfait que pour qu’en s’efforçant d’y atteindre on arrive à quelque chose de mieux que ce qui se fait d’ordinaire. » J.-J. Rousseau se place systématiquement dans