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ne se borne pas à expliquer sa foi dans l’intimité d’une correspondance de jeunesse : elle la confesse et la défend contre ses amis de l’âge mûr qui l’attaquent ou qui ne la respectent pas assez à son gré : « Oui, il faut que je revienne pour vous dire que, toutes les fois que je me promène dans le recueillement et la paix de mon âme, au milieu d’une campagne dont je savoure tous les charmes, je trouve qu’il est délicieux de devoir ses biens à une intelligence divine : j’aime et je veux alors y croire. Ce n’est que dans la poussière du cabinet, ou pâlissant sur les livres, ou dans les tourbillons du monde, en respirant la corruption des hommes, que le sentiment se dessèche et qu’une triste raison s’élève avec les nuages du doute ou les vapeurs de destruction de l’incrédulité. Comme on aime Rousseau ! Comme on le retrouve sage et vrai quand on le met en tiers seulement avec la nature et soi ! » (Lettre à Bosc, datée du Clos 2 juin 1786.) Et n’est-ce pas Rousseau qu’elle appelle encore en tiers entre elle et ses bourreaux, lorsque, à quelques jours à peine de sa condamnation, elle écrivait, pleine de confiance dans la justice d’un monde futur : « Quand des murs immenses me séparent de ce que j’aime, quand tous les maux de la société nous frappent ensemble comme pour nous punir d’avoir voulu son plus grand bien, je vois au delà des bornes de la vie le prix de nos sacrifices et le bonheur de nous réunir ! »

II