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et elle s’arrête avec bonheur devant les touffes de violettes qui bordent les haies gonflées par les premiers bourgeons du printemps, ou devant les pampres rougis qui frissonnent au souffle de l’automne ; tout lui parle, tout lui rit dans les prés et les bois. George Sand répandra un jour sur ces agrestes tableaux un éclat incomparable : elle n’y portera ni plus de naturel ni plus de fraîcheur.

En même temps que son cœur était ouvert aux sentiments de la famille et à l’amour de la nature, Mme Roland avait l’esprit touché des grandes idées de sociabilité et de fraternité humaine. Le Contrat social et les Lettres écrites de la montagne étaient son Évangile. En 1771 elle avait pris parti pour le Parlement contre la Royauté. En 1774, apprenant que le roi Louis XV a été administré, elle éprouvait un trouble profond : « Quoique l’obscurité de sa naissance, de son nom, de son état semble la dispenser de s’intéresser au gouvernement, elle ne peut s’empêcher de penser à l’avenir de sa patrie. » À vingt-deux ans et alors que les bruits avant-coureurs de la Révolution commençaient à peine à se faire entendre, elle prévoyait de quel côté elle serait entraînée. Elle avait arrêté ses principes : le concours perpétuel des actions particulières au bien commun, la bienfaisance générale, la tolérance universelle, voilà ce qui ferait sa religion, quand toute autre lui manquerait. «  Environnée de mes semblables, placée au milieu d’une société dont le bonheur général nous paraît l’objet légitime des travaux de chacun de ses membres, je désire, disait-elle, être heureuse de la manière la plus convenable au bien de mes frères… Le bien commun est et doit être le but de toute liaison possible…