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ils espérer pour eux-mêmes quelque douceur de vie, si leur plus étroite société, qui est celle du mariage, se tourne en amertume ?… Mais les enfants, qui seront dans la suite tout le genre humain, que deviendront-ils si les mères les gâtent dès leurs premières années ?… Mais la vertu est-elle moins pour les femmes que pour les hommes ?… Bien plus, il est constant que la mauvaise éducation des femmes fait plus de mal que celle des hommes, puisque les désordres des hommes viennent souvent et de la mauvaise éducation qu’ils ont reçue de leur mère et des passions que d’autres femmes leur ont inspirées dans un âge plus avancé. Quelles intrigues se présentent à nous dans les histoires, quelles révolutions d’État causées par le dérèglement des femmes !… » Et finissant, comme il a commencé, avec une simplicité hardie : « Voilà ce qui prouve, s’écrie-t-il, l’importance de bien élever les filles ; cherchons-en les moyens. » Reprise bien des fois depuis, la controverse a été de nos jours rouverte avec éclat ; mais je ne crois pas qu’on y ait jamais apporté plus de vigueur.

Même du temps de Fénelon la question n’était pas nouvelle. L’antiquité païenne n’en avait méconnu ni la délicatesse ni la portée. Est-il rien de comparable, pour la grâce de la raison et la fraîcheur du sentiment, au tableau de l’intérieur domestique où nous introduit l’Économique de Xénophon ? Musonius et Plutarque n’admettaient point que pour l’instruction morale on établît aucune différence entre les sexes : ils voulaient, l’un, que le frère et la sœur reçussent les mêmes principes ; l’autre, que l’époux fit part à l’épouse de ce qu’il avait recueilli de meilleur dans ses études ou trouvé dans son