d’étudier les réserves ou de suivre les transformations.
Ce n’est pas cependant d’après les principes de l’Émile que Suzanne Curchod avait été élevée. Son éducation ne ressemble à rien moins qu’à celle de Sophie, sauf en ce point que, comme Sophie, elle n’avait jamais quitté la maison paternelle. Mais si son père avait été son seul précepteur dans la patriarcale retraite de Crassier, il était loin d’avoir borné ses leçons à quelques conversations utiles et à la lecture de Télémaque. Mlle Curchod entendait le grec, écrivait le latin, parlait plusieurs langues, savait la botanique et connaissait les éléments de la physique et de la géométrie. Fort recherchée pour son esprit et sa beauté, elle avait institué à Lausanne, que sa famille était venue habiter pour elle, une Académie des Eaux où la jeunesse des deux sexes se livrait à des exercices littéraires que ne distinguait pas toujours la simplicité. Sous les auspices de Thémire — c’est le nom qu’elle s’était donné, — les cimes alpestres qui couronnent le lac de Genève et les riantes campagnes du pays de Vaud avaient vu renaître les fictions de l’Astrée jadis enfantées dans la fièvre des grandes villes. Cette éducation à la fois simple et hardie, grave et aimable, fondée sur une large base d’études et ouverte à toutes les inspirations, même à celles de la fantaisie, avait été également celle de Germaine. Toute jeune, Germaine avait sa place aux vendredis de sa mère, sur un petit tabouret de bois où il lui fallait se tenir droite sans défaillance ; elle entendait discourir sur la vertu, les sciences, la philosophie, Marmontel, Morellet, D’Alembert, Grimm, Diderot, Naigeon, Thomas, Buffon, se prêtait