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prédicateur d’activité comme vous, enveloppé d’une robe de chambre, en bonnet de nuit et couché sur deux chaises au milieu du jour ? » Mme d’Épinay payait de sa personne. Mlle d’Ette nous la représente au milieu des répétitions et des préparatifs d’une comédie, s’enfermant tous les matins deux heures dans sa chambre pour donner à Pauline sa leçon de musique, de lecture et de catéchisme. Elle s’étudiait à la suivre dans le libre développement de sa nature. Un des reproches qu’elle faisait à Rousseau, c’était de se substituer partout lui-même, ses idées, son âme à celle de tout le monde ; la Nouvelle Héloïse la laissait froide : c’est toujours l’auteur qui parle, disait-elle. Comme Fénelon et Mme de Maintenon, elle pensait que le mieux était de laisser vivre l’enfant de sa vie, « afin de l’amener à se bien connaître et à indiquer lui-même ce qu’il lui fallait. » Pour rien au monde elle n’eût voulu tromper Pauline ni se tromper sur elle. S’il lui échappe de dire : « J’en veux faire un ange, » le sens pratique reprend bientôt le dessus, et ce qu’elle voit surtout dans sa fille, ce sont les défauts. C’était une jolie enfant, intéressante, d’une intelligence qui s’annonçait dès trois ans, mais très décidée, d’une sensibilité extrême et que le couvent « avait lardée de deux mille défauts. » La vie de salon ne lui avait pas toujours été bien saine non plus. Elle s’était accoutumée à jouer un rôle, elle en était enorgueillie, elle papillotait et tranchait. Mme d’Épinay ne craint pas de s’assurer la complicité de ses amis pour la corriger ; et ces petites leçons, intervenant avec esprit, ne manquent jamais leur effet. Mme d’Épinay ne lui donnait elle-même que la fleur de ses sentiments. On admirait, non sans raison, que Pauline