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un Romain, un Égyptien, un Grec, un Spartiate ; il est né Français, c’est donc un Français qu’il faut faire, c’est-à-dire un homme à peu près bon à tout. Peu de latin, très peu de latin ; point de grec ; que je n’en entende point parler ! S’il lui arrivait de le connaître sans en être ivre, il ne serait qu’un plat érudit et, s’il en devenait enthousiaste, il se rendrait ridicule. Un peu d’histoire, de géographie, sur la carte, en causant. Du calcul, tout se compte ; de la géométrie, tout se mesure, et surtout beaucoup de morale. Mais n’allez pas surtout lui interdire les plaisirs, les passions, l’ambition de se faire sa place : il faut qu’il vive et, s’il reçoit un coup de coude, qu’il sache le rendre. » — « C’est le latin qu’il doit apprendre, disait de son côte M. d’Épinay, non pour entendre ses auteurs, il n’importe, car on ne les lit jamais une fois sorti du collège, attendu que cela ne mène à rien ; mais seulement pour se tirer des cahiers de Justinien. Avec cela, des talents agréables ; je veux que l’enfant emploie deux heures par jour à l’étude du violon et deux heures à celle des jeux de société ; il faut qu’il sache défendre son argent : arrangez le reste comme vous le voudrez ; mais songez que c’est ma volonté. » Mme d’Épinay faisait de son mieux pour combattre cette volonté, au nom des principes de Rousseau. C’est en causant avec son fils, en promenant ses yeux et ses oreilles, en l’amusant, qu’elle aurait voulu lui ouvrir l’esprit. À quoi elle ajoutait les sentiments : « Aimer ses semblables, leur être utile et s’en faire aimer ; voilà la science dont on ne peut se passer. » Elle faisait aussi beaucoup de fond sur les exemples. En se décidant à emmener son fils à Genève (il avait alors douze ans), elle avait compté sur le spectacle