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La Bruyère visant Fontenelle, a un ami qui n’a point d’autre fonction sur la terre que de le promettre longtemps à un certain monde et de le présenter enfin dans les maisons comme un homme rare et d’une conversation exquise. » Les conversations du Louvre n’étaient pas moins recherchées que les représentations de Corneille ou de Molière. Balzac, Nicole, le P. André, en avaient recueilli les règles et fixé le code. Une littérature nouvelle en était issue. On écrivait des Conversations comme on faisait des Maximes et des Portraits. Saint-Évremond avait dû le premier essor de sa fortune à sa Conversation entre le maréchal d’Hocquincourt et le P. Canaye. Il était resté le maître du genre. Il avait besoin de cet appel du dehors, c’est lui qui le confesse, pour mettre son esprit en mouvement et dissiper la demi-obscurité que laissait dans ses idées une réflexion volontiers paresseuse ou indulgente à elle-même. S’il reconnaissait que « l’étude est nécessaire pour féconder les talents, » il tenait pour non moins incontestable que « c’est la conversation qui les met en œuvre, qui les polit, qui les épure, qui d’un homme savant peut faire un honnête homme » ; il l’appelait le grand livre du monde. Ce grand livre du monde était le livre préféré des femmes. La lecture et la conversation étaient aux yeux de Mlle de Scudéry les instruments du savoir. Obligée de choisir, elle eût conseillé la conversation. Elle en avait elle-même rédigé des modèles que Mme de Maintenon avait d’abord introduits à Saint-Cyr, qu’elle avait ensuite écartés comme d’un caractère trop dissipé, mais pour les remplacer par de petites scènes faites de ses propres mains, qui n’en différaient guère que par le choix des sujets. L’usage de ces