est la fée du logis, elle en est aussi la folle, et rien n’est plus mortel au bonheur que d’avoir « l’âme trop allumée. » De même que l’imagination, le goût porte en lui-même ses dangers : il se fatigue et raffine ; l’habitude des purs plaisirs de l’esprit engendre une excitation malsaine : on se croit délicat, alors qu’on n’est que blasé. Ainsi en est-il du sentiment en général ; sa vivacité s’émousse, à moins que, par un effet contraire, s’animant et s’exaltant, comme dans l’amitié appliquée d’un sexe à l’autre, il ne fasse sortir une passion funeste d’une vertu qu’on n’a pas su maintenir dans des limites rigoureuses. Mme de Lambert a l’intelligence très nette de ces infirmités et de ces entraînements : les dons de nature les plus séduisants lui paraissent insuffisants et pleins de périls, si l’éducation n’en règle et n’en élève l’emploi.
V
Qu’est-ce donc qu’elle entend par l’éducation des femmes ? « J’ai trouvé dans Télémaque, disait-elle, les préceptes que j’ai donnés à mon fils, et dans l’Éducation des filles les conseils que j’ai donnés à la mienne. » Fénelon est son maître. Elle était de la petite Église dont les espérances s’étaient groupées autour de l’archevêque de Cambrai. Après la mort du duc de Bourgogne, elle lui avait exprimé sa douleur. « Que n’attendait-on pas d’un prince élevé dans des maximes si pures, si bien instruit des justes bornes qu’on doit mettre à l’autorité, qui avait déplacé la gloire du monde, qui ne la