du sacrifice fait de soi ou d’une partie de soi. Elle sait quelle est la médiocrité des ambitions courantes : les hommes ne veulent pas être grands ; ils ne se soucient que d’être élevés ; ce sont les distinctions que l’on cherche, non la vraie gloire. Et voilà l’illusion, non moins dangereuse que coupable, dont elle voudrait préserver son fils : « Si un grand nom met tout à portée, il ne donne pas le droit de tout obtenir. Ceux qui n’apportent à leurs emplois d’autres mérites ni d’autres dispositions que de les désirer, ne s’y soutiennent pas longtemps. » La Bruyère n’a rien écrit sur le mérite personnel de plus fier que ces maximes : « lI y a des princes de naissance, il y a des princes de mérite. — Rien de plus heureux qu’un homme qui jouit d’une considération qu’il ne doit qu’à lui ; rien de plus triste qu’un grand seigneur accablé d’honneurs et de respects qu’on ne rend qu’à sa dignité. — Avec de grands emplois et des principes vulgaires, on est toujours agité parce qu’on est toujours médiocre. — C’est par les sentiments qu’il faut se distinguer du peuple : j’appelle peuple tout ce qui pense bassement et communément : la cour en est remplie. — Qu’est-ce que des courtisans ? Des glorieux qui font des bassesses ou des mercenaires qui se font payer. » En opposant si énergiquement la grandeur réelle aux grandeurs d’institution, Mme de Lambert n’ignore pas à quoi elle s’engage. On ne peut s’élever qu’en s’imposant une règle morale. Cette règle, elle en examine successivement les applications aux devoirs de l’homme envers la société, envers ses supérieurs, envers ses inférieurs, envers soi-même : cadre un peu fatigué aujourd’hui par l’usage, qui avait alors sa nouveauté, qui répond d’
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