ailleurs de moyens fort ordinaires, n’attendit point pour faire son coup d’éclat le nombre des années, Mme de Sévigné admirait avec une chaleur naïve « comme on avait pressé et précipité heureusement sa vie. » Il n’avait pas encore seize ans accomplis, lorsqu’il était parti en campagne avec le Dauphin ; et c’est elle qui de Paris annonce à la famille le succès de ses premières armes : « Philipsbourg est pris et votre fils se porte bien. » Bien portant et blessé toutefois « d’une fort bonne petite contusion à la jambe qui lui fait le plus grand honneur. » Une contusion et de la gloire ! Ajoutez « le miracle de sagesse qui lui avait permis de se retirer de certaines parties trop gaillardes. » Au témoignage de la grand’mère, Mme de Grignan ne jouissait pas assez de ce sang-froid, de ce courage, de cette admirable réserve. Pour elle, elle ne se retenait point de louer ce que disait le jeune vainqueur, ce qu’il faisait, ce qu’il écrivait : « son style tout naturel, tout jeune, sans art, ses petites raisons, ses sentiments tout neufs. » Elle se le figurait à la cour, admis à saluer le roi et les ministres. M. de Grignan, qui triomphait de cette fortune naissante, ne mettait pas à la célébrer plus d’effusion.
Mais le dévouement de Mme de Sévigné pour son petit colonel n’allait pas jusqu’à oublier « Paulinotte. » Un jour que Mme de Grignan avait acheté à sa fille un habit et une cornette, elle l’en félicite : s’il faut avant tout songer à son frère, ce n’est pas une raison « pour reléguer la sœur au grenier. » Pendant dix ans, la