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des réunions de jour. On s’assemblait à une heure pour dîner ; et après le repas, quand les esprits avaient été mis en train par les premiers engagements de la table, l’entretien était ouvert pour se clore avant la nuit. Chacun des membres du cénacle apportait son tribut : une nouvelle, une fable, une maxime, une lettre, un portrait. Parfois on allait jusqu’à la tragédie ; mais l’usage était de faire court, afin de laisser à la discussion plus de champ. C’était, le mot est d’un contemporain, une sorte de conférence académique ; conférence fort animée d’ordinaire et où les « petites poitrines » étaient à plaindre, mais dont les conclusions courtoises et mesurées laissaient tout le monde en belle humeur. « ll est bien flatteur pour mon amour-propre, disait Mme de Lambert, de trouver toutes les vertus en même temps que tous les agréments dans les personnes que j’aime. » Le soir, si elle provoquait une autre assemblée, la compagnie n’était plus la même : « la décoration changeait ainsi que les acteurs. » Sans se permettre pour elle aucun relâchement de ton, elle laissait davantage les autres se détendre. « J’étais des deux ateliers, écrit le président Hesnault, marquant la différence : je dogmatisais le matin, je chantais le soir. » Le vrai mardi, c’était le mardi où l’on dogmatisait, le mardi de l’après-diner.

Qu’il y eût dans cette tenue irréprochable un peu plus de représentation qu’il n’était nécessaire, cela n’échappait à personne. Les esprits libres, comme Lesage, ne pouvaient trouver bon « qu’on y fit si peu fête au roman égayé, tandis qu’une églogue ou un sonnet y passait pour le plus grand effort du génie humain. » Les amis de la maison reprochaient eux-mêmes