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sous les auspices de Mme de Lambert, autour de ceux qui avaient concouru à fonder la réunion : l’abbé de Mongault, de Sacy, Dortous de Mairan, Houdart de Lamotte et Fontenelle. Il avait suffi à l’abbé de Mongault et à de Sacy de traduire avec une élégante correction les lettres de Cicéron et celles de Pline pour « acquérir cette fleur de réputation qui avait répandu comme une bonne odeur sur leur personne et sur leur vie. » L’autorité de Dortous de Mairan reposait sur des fondements plus larges ; c’était un savant de premier ordre par l’étendue de l’esprit autant que par l’exactitude des connaissances : on l’a justement appelé le Cuvier de son temps. Mais rien ne marque mieux le caractère de cette société que la place qu’y tenait Houdart de Lamotte. Il serait difficile aujourd’hui de n’être pas de l’avis du président Hesnault lorsque, dans sa vieillesse, appréciant comme il convient la poésie ingénieuse et la prose agréable de Lamotte, il ajoutait finement : « ni l’une ni l’autre n’invite à continuer. » Tel n’était point le sentiment de l’entourage dont il avait fait lui-même partie : tragédies, opéras, comédies, ballets, discours en vers, dissertations critiques, églogues, fables, il n’était rien qui, sortant de la plume de M. de Lamotte, ne fût commenté avec admiration. Mme de Lambert le traitait, sans marchander, « d’âme à génie et de grand homme. » Les contemporains ont de ces complaisances. Il est clair que chez Lamotte l’homme était très supérieur à l’écrivain : la sûreté de son jugement lorsqu’il ne se laissait point surprendre par la passion, sa bonne grâce, que n’avait point altérée la plus cruelle des infirmités, son talent de lecteur, son âge, la considération dont il jouissait, en