Page:Gréard - L’Éducation des femmes par les femmes, Hachette, 1889.djvu/21

Cette page n’a pas encore été corrigée

de son éducation, quand personne n’y songeait encore : n’allait-on pas lui donner un précepteur ? Bien qu’elle ne l’eût guère connu qu’à distance, elle s’était fait de son tempérament, de son caractère, de son esprit, une idée exacte. « Il me paraît déjà un fort honnête homme, » écrivait-elle à sa mère ; — il avait alors moins de dix ans ; — « j’aimerais mieux son bon sens et sa droite raison que toute la vivacité de ceux qu’on admire à cet âge, et qui sont des sots à vingt ans. » Elle voulait qu’on le ménageât « comme un cheval qui a la bouche délicate. » Une saignée faite mal à propos la mettait en émoi. Il ne lui fallait point « d’éducation rustaude. » Elle répétait, au nom de Brayer et de Bourdelot, « qu’à vouloir faire trop robustes les enfants qui ne sont pas forts, on les fait morts. » Le marquis était né court et gros garçon. Il s’était mis à grandir un peu ; mais ce n’était pas assez pour se récrier : il n’aurait jamais la prestance de son père. Mme de Sévigné s’en consolait. Son inquiétude était de ne lui pas voir assez de penchant pour les sciences et pour la lecture. Mais elle se félicitait de la justesse de ses sentiments ; elle aimait à citer à Mme de Grignan l’exemple de M. du Plessis « donnant au petit d’Auvergne l’esprit de règle et d’économie, et travaillant doucement à lui ôter cet air de grand seigneur, de qu’importe ? d’ignorance et d’indifférence qui conduit fort bien à toute espèce d’injustice et enfin à l’hôpital. » Cette éducation-là lui semblait « plus noble » qu’une autre. Comme Rodrigue, le petit marquis, qui était d’