trois princesses et six chiens autour d’elles ; elle n’était pas toujours sûre de pouvoir finir, mais elle commençait : c’était autant de fait ; faute de mieux, le mot partait inachevé. On disait dans la maison qu’elle ne cessait de prêcher ; elle répliquait que c’est parce qu’on l’y poussait ; mais elle ne faisait pas difficulté de reconnaître qu’elle avait toujours quelque morale à entamer, et elle s’y abandonnait de bon cœur.
Elle ne se bornait pas d’ailleurs à éclairer les consciences, à rectifier les esprits, à échauffer les cœurs : elle était l’intendante générale de la maison ; elle traitait avec les fournisseurs, réglait les provisions et pour toute chose voulait savoir son compte : à Dieu ne plaise qu’elle cherchât à thésauriser ; mais elle haïssait le désordre et aimait mieux « nourrir les demoiselles que de crever les laquais. » Elle avait souvent été à elle-même son propre maître d’hôtel, et chez Mme de Montchevreuil elle ne faisait pas de façons à mettre la main au pot-au-feu. Il ne lui en coûtait point d’être « l’économe, la femme d’affaires, la servante de Saint-Cyr. » Elle avait le génie de l’organisation et le goût de l’administration ; rien ne la rebutait ni ne la trouvait indifférente. À la veille d’une campagne, Napoléon savait exactement le nombre des chevaux qui se trouvaient dans les écuries de l’armée et le nombre de bottes de foin dont il disposait. Mme de Maintenon est au courant de ce que les armoires de Saint-Cyr contiennent de linge ; il ne faudrait pas essayer de la tromper sur les paquets de tabliers qu’elle a fait passer ; quand elle envoie des boîtes de dragées ou de confitures, elle dit à qui elles doivent aller, et elle sait à qui elles vont.